KOREA FOUNDATION

Les Trash Busters interviennent dans tous les lieux susceptibles de provoquer des problèmes liés aux déchets en plastique à usage unique, qu’il s’agisse de cafétérias d’entreprise, de cinémas, de manifestations culturelles telles que les festivals ou de bien d’autres encore. Elle s’est fixé pour objectif d’encourager les consommateurs à opter pour un mode de vie qui génère moins de déchets grâce au recyclage et à la réutilisation des produits.
© Trash Busters

Tels les personnages du film Ghostbusters pourchassant les fantômes, les membres du mouvement Trash Busters ont entrepris de faire la chasse aux déchets et, pour ce faire, de sensibiliser la population à leur cause en accourant sur les lieux de festivals ou d’obsèques, ainsi que dans les cafétérias, qui sont autant d’occasions ou endroits susceptibles d’entraîner l’abandon de nombreux déchets. C’est son actuel directeur, Kwak Jae-won, qui a pris l’initiative de sa création à l’époque où il intervenait auprès de la Ville de Séoul en tant qu’organisateur de festivals et l’image des montagnes de déchets qui subsistaient après chacune de ces manifestations est encore très présente à son esprit. Dans la mesure où au moins trois articles jetables y étaient utilisés par personne, leur quantité totale pouvait atteindre trente mille, Kwak Jae-won et ses collaborateurs estimant alors que l’emploi de conditionnements réutilisables permettrait d’éviter un tel gâchis. Dès l’année suivante, ils allaient passer à l’action en fournissant aux festivaliers assiettes, fourchettes, tasses et bols en plastique qu’ils récupéraient et nettoyaient à la fin des spectacles, cette initiative se révélant plus efficace que s’ils leur avaient demandé d’apporter eux-mêmes des articles réutilisables. Cette nouvelle manière de procéder allait permettre une réduction considérable du volume de déchets à usage unique.

Tant de détermination allait impressionner les partenaires de Kwak Jae-won, qui allaient lui permettre d’expérimenter un service de location d’articles réutilisables à l’occasion du festival de musique pop Seoul Soldout, lequel allait attirer un nombreux public jeune à l’été 2019. La somme de ces efforts a fini par porter ses fruits, puisque la masse des objets abandonnés lors de cette manifestation a diminué de 98 % par rapport à l’année précédente, atteignant presque ainsi l’objectif du « zéro déchet ».

Dans un premier temps, la location de couverts et assiettes assortie du paiement d’une caution remboursable a quelque peu déconcerté les festivaliers peu coutumiers de cette pratique, mais ils n’allaient pas tarder à en constater les avantages pour les hommes et leur environnement. La prise de conscience de l’importance de cet enjeu et l’adhésion à l’emploi d’objets réutilisables incitent désormais les spectateurs des manifestations culturelles à emprunter et restituer de tels articles qui ne sont en outre pas toujours consignés.

Le mouvement des Trash Busters a su tirer les enseignements de ces nouveaux comportements et ce faisant, il a d’autant plus accru son audience auprès du public. Quant aux objets eux-mêmes, leur conception a évolué afin de les adapter au lieu de leur utilisation et à l’atmosphère qui y règne, comme celle de ces récipients destinés à différents types d’aliments, de ces porte-gobelets munis d’une sangle facilitant le transport ou de ces pochettes pliables pouvant servir de nappe.

Pour la couleur de ces différents articles, le mouvement des Trash Busters a porté son choix sur l’orange vif en raison de l’impression d’optimisme qui s’en dégage, et pour son logo, sur un nom évocateur du film Ghostbusters qui convient parfaitement à l’ambiance festive de ces manifestations culturelles. Quant au slogan « Ce n’est pas sorcier ! » qu’affichent sur leur salopette les membres du mouvement Trash Busters, il donne une idée de la démarche simple, mais non moins déterminée qu’ils ont adoptée, préférant ces quelques mots pleins de bon sens aux expressions souvent galvaudées d’« écologique », « vert » ou « respectueux de l’environnement ».

Cette image positive a permis au mouvement Trash Busters de se voir solliciter pour l’organisation de manifestations et de rassemblements d’envergure attirant un public friand de divertissements, du festival de musique underground aussi branché qu’auréolé de mystère The Air House à celui de Rock Incheon Pentaport, première scène en plein air du genre par son importance en Corée, en passant par Melody Bar Echo, ce confortable bar à LP du quartier de Samgakji situé à Séoul. Si la manière d’appréhender une marque peut varier en fonction des consommateurs et du lieu de leur consommation, le mouvement Trash Busters s’est sans conteste imposé comme une marque tendance en ces temps de changements climatiques.

Les Trash Busters s’affirment que la mise en place d’un dispositif intégré de collecte, nettoyage et location de récipients réutilisables peut rapidement entraîner l’abandon des produits à usage unique.
© Trash Busters

L’action engagée par le mouvement Trash Busters ne concerne pas uniquement le public des festivals car, dès sa création, il est intervenu dans des endroits aussi différents que les restaurants d’entreprise, les lieux de manifestations culturelles, les stades de football et les cinémas. La pandémie de Covid-19, en contraignant à de nombreuses annulations de festivals au cours des trois dernières années, n’a pas pour autant dissuadé les Trash Busters d’envisager de nouveaux domaines d’intervention.

Avec la multiplication des entreprises qui mettent en œuvre les stratégies dites ESG (Environnementales, Sociales et de Gouvernance), le nombre de clients faisant appel aux services des cafétérias d’entreprise où interviennent les Trash Busters a plus que doublé en un an et, si son activité de location peut paraître d’une moindre ampleur que dans les festivals, elle se révèle tout aussi importante. En se livrant à une promotion active de leur action en faveur des produits réutilisables auprès du public, les Trash Busters permettent que ces articles soient proposés en priorité dans ces lieux. Désormais, le secteur sait tirer parti des technologies disponibles pour assurer lavage automatisé et réutilisation hygiénique qui permettent de mieux rentabiliser ces objets. C’est là qu’interviennent les prestations du mouvement Trash Busters en vue d’une rationalisation et d’une meilleure attractivité du recours aux articles réutilisables, lequel entraîne à son tour d’autres changements.

Il est intéressant de constater qu’un arrêté municipal de la Ville de Séoul interdit désormais l’emploi de tout article jetable lors des manifestations qu’elle organise, cette mesure corroborant l’idée que la démarche visant à réduire ce type de produits et à encourager l’utilisation judicieuse des ressources du secteur privé répond aujourd’hui aux aspirations du public.

S’agissant de questions ayant trait à l’environnement et au climat, certains se montrent des plus cyniques, comme l’a souligné la militante et écrivaine américaine Rebecca Solnit, dont l’engagement pour les causes de l’écologie, des droits humains et du refus de l’énergie nucléaire remonte aux années 1980, et elle a parlé à ce propos de « cynisme naïf ». Arguant que ces personnes se fondent sur de fausses informations pour envisager l’avenir avec fatalisme en raison des erreurs du passé, elle estime que leur position « ferme le champ des possibles aux individus et les incite à n’avoir aucun sens des responsabilités ».

Face à un tel état d’esprit, l’appel à agir que lance le mouvement Trash Busters par son slogan « Ce n’est pas sorcier ! » prend une dimension percutante et provocatrice visant à convaincre le public que le problème des déchets n’est pas insurmontable. C’est aussi en ce sens que doit se comprendre le propos de Rebecca Solnit lorsqu’elle déclare qu’il ne faut jamais abandonner, même en ayant un sentiment d’impuissance, mais au contraire tout entreprendre pour relever les défis du monde actuel.

Si la loi interdit aujourd’hui l’utilisation d’articles jetables dans les cafés, celle des gobelets en papier n’a pas cessé et certaines personnes se servent même de deux d’entre eux en même temps au lieu d’un porte-gobelet. Par ailleurs, la pratique croissante de la livraison de repas entraîne la production de toute sorte de récipients qui constituent autant de déchets potentiels. Les supermarchés se sont certes vu interdire la fourniture de sacs en plastique à leurs clients, mais les fruits et légumes sont encore le plus souvent conditionnés dans des emballages individuels de ce type. Ces réalités qui incitent parfois à une résignation coupable doivent au contraire mettre en évidence le rôle essentiel de groupes tels que le mouvement Trash Busters et l’action qu’il accomplit, car la protection de l’environnement ne se résume pas à la lutte contre le gaspillage, mais exige aussi de combattre les mentalités défaitistes qui dissuadent toute initiative et constituent un obstacle à de véritables changements.